Découvrez le portrait de Florence Chabanois, entrepreneure du numérique!

Femmes du Numérique : Pour commencer, quelle est votre définition du « numérique » ?

Florence Chabanois : Pendant longtemps, cela signifiait sites web pour moi. Aujourd'hui, les usages sont en pleine mutation : on ne peut plus ignorer les appareils mobiles et les objets connectés.  Il y a du numérique partout !

FDN : Les femmes, une opportunité pour le numérique. Le numérique, une opportunité pour les femmes. Qu’en pensez-vous ? Pourquoi avez-vous choisi ce secteur ?

FC : Pour moi, c'est forcément un souci quand l'un des deux sexes est extrêmement minoritaire dans un secteur d'activité. Il y a effectivement un trop gros déséquilibre dans le secteur du numérique et des sciences en général. Peut-être parce qu'on encourage plus les petites à êtres sages, à bien se tenir, à être à l'écoute qu'à être dans l'action... Du coup, elles se tournent vers les métiers qui vont avec.

J'ai choisi de travailler dans l'informatique après des études de sociologie, quand j'ai vu que c'était un métier créatif. Je n'allais pas forcément devoir passer mes journées dans une cave à travailler comme un robot. Au contraire, j'allais créer des choses et résoudre des problèmes. Je pourrai créer des sites web de mes propres mains ! Cela me paraissait fou et magique à l'époque.

FDN : Etre une femme entrepreneure, est-ce un plus ?

FC : Me lancer dans entrepreneuriat m'a ouvert les yeux sur les problématiques des autres métiers du web. Je côtoyais tous les jours des chargés de référencement naturel (Google), de partenariat, de relation client, des designers, etc., mais c'est seulement en faisant une partie de leur travail moi-même tant bien que mal dans le cadre de mon projet que j'ai commencé à véritablement comprendre leur métier. Le fait d'avoir lancé une entreprise en parallèle de mon job m'a aidé à encore mieux faire mon job « officiel ».

FDN : Avez-vous eu des doutes, des hésitations, ou rencontré des difficultés dans votre création d’entreprise ?

FC : Bien sûr ! Cela ne m'a pas empêché d'avancer car j'avais décidé en amont de ce que j'étais prêt à perdre (50 € max, temps illimité). Pour prendre plus rapidement la bonne direction, le tout est de savoir qu'on se trompe le plus vite possible. Avec une culture de feedbacks réguliers (=je teste les hypothèses avant de les généraliser), les hésitations ne durent pas longtemps. Le tout est de confronter les hypothèses à la réalité rapidement pour ajuster le tir le plus vite possible quand nécessaire.

FDN : Présentez-nous votre projet. Comment cette idée est-elle née ? A quel besoin répondez-vous ?

FC : Après un accouchement, les médecins parlent souvent de rééducation périnéale, et même d'exercices à faire toute seule chez soi. A chaque fois que le thérapeute me demandait si je les avais réalisé, je répondais vaguement honteuse que je n'avais pas pris le temps. La vérité était que j'étais déjà bien occupée et surtout que les exercices étaient terriblement ennuyeux à réaliser. Je m'endormais à chaque fois.

Rendre cette activité amusante pourrait-il également servir à d'autres mamans ? Quelques semaines après, je montais un site web pour vérifier cette hypothèse, avec un exercice gratuit en ligne. Quelques mois après, je m'alimentais des histoires de mamans au téléphone ou en abordant des personnes à la gare Saint Lazare pour dessiner la première version de l'application mobile.

En août 2014, la première application 100 % française pour la rééducation périnéale voyait le jour sous le nom de Perigym.

FDN : Au travers de votre activité professionnelle mais aussi de votre vie personnelle, comment défendez-vous l’égalité femme-homme ?

FC : J'essaie déjà de me débarrasser de mes propres bagages en ne me conduisant pas comment on peut l'attendre d'une fille. Je ne fais pas la moue, je ne demande aucun geste de galanterie, même implicite, je ne dis pas que « ça m'a fait de la peine », je ne me pose pas en victime. Voilà pour le milieu professionnel.  Dans la sphère personnelle, c'est plus compliqué car inconsciemment, on a des choses qu'on accepte plus facilement d'un garçon que d'une fille et vice versa. J'en suis encore à déjà essayer de bien les repérer. Par exemple, s'il y a du bricolage à faire, je vais en premier demander à mon époux de s'en occuper plutôt que me renseigner pour voir comment le faire. C'est mal et j'essaie de me faire violence sur ces sujets.

FDN : Et vous, personnellement, comment êtes-vous parvenue à concilier vie professionnelle et vie personnelle/familiale ?

FC : Via des limites claires. Mes horaires de travail sont les heures de bureau classique, puis de 23h jusqu'au dodo. Je ne travaille pas quand les enfants sont réveillés ou présents non plus par exemple.

FDN : Quel conseil donneriez-vous à une jeune femme qui hésite à travailler ou à créer son entreprise dans le secteur du numérique ?

FC : De se lancer. Après, c'est tellement bien qu'on ne peut plus s'arrêter. Mon deuxième conseil pour les personnes ayant peur de mal faire : ne parler pas de votre projet à votre entourage dans un premier temps. Ils sont plein de bonnes intentions et aussi de « oui mais », qui nous distraient de la réalisation et peuvent nous faire hésiter à avancer. En gardant le projet « secret », vous aurez moins peur de vos échecs, indispensables à l'apprentissage.

Monter un projet dans le numérique nécessite tellement peu d'investissement financier de départ, c'est juste incroyable. J'ai monté mon projet avec un budget de départ 50 € et du temps. De nombreux services du cloud permettent d'avoir des services très pro à disposition gratuitement sur les premiers paliers (mailchimp pour les newsletters par exemple). Même si vous ne savez pas développer, les plateformes de blog type wordpresspermettent de construire des sites très simplement. Il faudra « juste » payer de votre temps quand vous voudrez aller plus loin avec. Internet est une mine d'or pour monter en compétences sur les métiers que vous aurez besoin d'exercer. Go.

Biographie

Florence travaille sur des sites grands public depuis presque 10 ans. Afin de rendre l'activité de rééducation plus fun, elle a monté le projet Rééducation Périnée fin 2013. Ce projet représente aussi un terrain de jeu pour voir les différentes facettes d'une entreprise. Aujourd'hui, le site www.reeducation-perinee.org génère 40 000 visites par mois et l'application mobile Perigym a été téléchargée quelques milliers de fois.