Les représentants de l’industrie numérique (AFDEL, GITEP TICS, SFIB, SYNTEC NUMERIQUE) souhaitent que les conclusions initialement attendues cette semaine de l’Avis du Conseil National du Numérique sur la fiscalité soient prises en compte avant l’élaboration de toute nouvelle taxe ciblant l’industrie du numérique. Souhaitant donner priorité à l’harmonisation fiscale internationale et européenne, les organisations réunies demandent, une nouvelle fois, aux pouvoirs publics d’abandonner tout projet de taxation nationale ciblant l’industrie numérique, notamment la taxe sur les appareils connectés versée au débat par le Rapport Lescure.

Dans l’attente de pouvoir publier son avis, le CNNum a révélé début juillet les contenus des débats et consultations tenues qui pointent unanimement les risques d’une solution fiscale nationale : « Aucune des parties prenantes ne se prononce pour l’adoption d’une taxe sectorielle nationale ». Tous les participants ayant réaffirmé l’impératif de se fonder sur les négociations internationales en cours à l’OCDE, qui a publié sa feuille de route la semaine passée, pour permettre aux Etats de lutter contre l’érosion de leurs bases fiscales. 

 

Le contenu des débats publiés démontre les limites et effets contreproductifs de chacune des nombreuses propositions qui a alimenté le débat public ces dernières années, qu’il s’agisse de la taxe sur la publicité en ligne, de la taxe sur l’achat de services de commerce électronique (TASCOé), de l’extension du système obsolète et opaque de redevance pour Copie privée au Cloud Computing, de la taxe sur la bande passante, ou de la taxe sur les données personnelles. Toutes menacent de pénaliser les acteurs français les plus innovants, c’est-à-dire la croissance et les emplois d’aujourd’hui et de demain.

 

Taxe Lescure : une taxe anachronique et inefficace

En toute logique, la taxe sur les appareils connectés, proposée récemment par le Rapport Lescure, mais vivement critiquée par les participants aux débats du CNN, devrait donc aussi être abandonnée. Loin d’être « indolore », comme le laisse entendre le ministère de la Culture, cette taxe censée prendre le relais de la très contestée redevance pour copie privée, reviendrait à taxer directement l’usage numérique quand il faudrait le promouvoir... « Il est dangereux de jouer aux vases communicants, alors que les consommateurs et les distributeurs contribuent déjà largement au financement de la culture » ont rappelé les participants aux débats. Il est en effet pour le moins paradoxal de souhaiter mettre en place des dispositifs dontla conséquence première sera de s’opposer à la diffusion la plus large possible des équipements et services numériques. 

 

Rappelons que les nouveaux usages sont à la fois le moteur de la démocratisation des contenus culturels, en particulier auprès des jeunes générations, et le principal levier de la compétitivité des entreprises, qui dépend entièrement de la digitalisation.

 

Le numérique n’est pas « capteur de valeur » mais créateur de valeur ! Le principe d’une telle taxe repose sur l’idée abusive de la captation de valeur par les acteurs du numérique alors même que ces derniers sont à l’origine d’une diffusion inédite et démocratique des contenus culturels, condition sine qua non de la valorisation de ces contenus. Les conclusions du rapport du cabinet Booz&Co sur le « Futur numérique des industries culturelles en France » sont ainsi parfaitement claires : « Les médias numériques constituent le moteur de toute la croissance enregistrée par les industries culturelles en Europe (30 milliards d’euros de revenus additionnels en 2011 comparativement à 2001 », ce qui revient à dire que « la totalité de l’augmentation des revenus de 30 milliards d’euros (7 milliards d’euros en France) peut être attribuée au numérique ces 10 dernières années ».

 

Il est donc crucial de veiller à maintenir un niveau de taxation qui ne porte pas atteinte au développement des usages numériques. Comme l’a affirmé la Ministre de l’Economie numérique Fleur Pellerin, « Ne raisonnons pas toujours en termes de taxe », il existe des alternatives pertinentes, par exemple dans le domaine du droit de la concurrence ou dans l’établissement de nouvelles relations contractuelles.

 

Parce que le numérique devient bien plus qu’un secteur en soi, par sa contribution toujours plus importante à la numérisation des autres secteurs industriels et de services, les représentants de l'industrie du numérique en France recommandent que, systématiquement, toute nouvelle piste de fiscalité soit aussi évaluée par le Parlement, quant à son rendement, la base de ses redevables et son assiette, au regard de son impact sur l’ensemble de l’économie qui tire aujourd’hui profit du numérique.