La France, entre volonté politique manifeste et manque de moyens.

Dans le contexte de l’annonce d’une accélération du virage numérique en santé dans le cadre de la stratégie de transformation du système de santé présentée début février, Syntec Numérique et SIA Partners présentaient ce jour l’étude « Lois et plans d’action pluriannuels en santé : comparaison internationale et enseignements pour la France ».

Portant sur 5 périmètres géographiques, cette étude apporte des conclusions utiles aux réflexions actuellement menées en France. Mise en perspective avec les exemples internationaux, la situation nationale paraît sur la bonne voie, mais si le portage politique fort et la constitution d’une mission e-santé envoient un message positif, la définition d’une trajectoire précise et chiffrée, avec des jalons d’ici 2022, est nécessaire pour concrétiser la transformation numérique du système de santé.

Une étude comparative internationale

L’étude apporte des éléments d’analyse qualitatifs sur les lois et plans d’action en santé mis en place dans 5 périmètres géographiques : pays anglo-saxons, pays scandinaves, autres pays européens, Chine et Union européenne.

Alors que l’organisation et le financement du système de santé diffèrent fortement entre les pays étudiés, les plans et lois étudiés ont en commun :

  • un portage politique clair ;
  • une inscription dans le temps long ;
  • des objectifs précis de déploiement de la e-santé ;
  • des financements dédiés ;
  • une association des industries de santé à la mise en œuvre du plan.

Parmi les conclusions notables :

  1. Les programmes étudiés ont une durée moyenne de trois ans, avec un financement moyen de l’ordre de 3 milliards d’euros.
  2. Les thématiques portées par ces programmes évoluent avec le temps, reflétant l’avancée de la numérisation des systèmes de santé étudiés. Ainsi, si les lois et plans d’action santé les plus anciens sont principalement centrés sur les plateformes et les systèmes d’information, le sujet des données émerge dans les plans les plus récents, autour de deux axes majeurs : l’accès par le citoyen à ses données de santé, et le développement de l’usage des données pour améliorer les traitements.
  3. Le cas de la Belgique apporte des enseignements en matière de bonnes pratiques : implication et coordination des autorités concernées par le plan, avec un rôle clairement défini pour chacune, incarnation du plan par une personnalité unique, relais et suivi du plan sur un site internet pédagogique pour informer les citoyens, communication forte autour des avancées du plan d’action.

La France à mi-chemin ?

En France, l’annonce récente par le Premier ministre et la ministre de la Santé d’une stratégie de transformation du système de santé plaçant l’accélération du virage numérique parmi les priorités témoigne d’une prise de conscience par les pouvoirs publics de la nécessité d’un portage de ce sujet au plus haut niveau. La constitution d’une mission e-santé placée auprès de la ministre de la Santé devrait quant à elle permettre une plus grande coordination des acteurs concernés par le numérique en santé.

Pour autant, les montants dédiés au numérique en santé dans le Grand Plan d’Investissement français sont comparativement faibles par rapport aux autres pays : 50 millions pour la télémédecine, 100 millions pour l’intelligence artificielle en santé, 420 millions d’euros pour le nouveau plan Hôpital Numérique (Hop’EN). De son côté, la stratégie de transformation du système de santé prévoit un montant dédié de 100 millions d’euros par an.

Ainsi, si la volonté politique d’accélérer le virage numérique en santé est là, les investissements annoncés sont insuffisants au regard des enseignements internationaux.

Cette étude renforce la conviction portée par Syntec Numérique dès la campagne présidentielle de 2017 de la nécessité d’une loi de programmation santé modelée sur les lois de programmation militaire, car une stratégie ambitieuse pluriannuelle, avec des objectifs précis, quantifiables et évalués annuellement, est un prérequis pour réussir la transformation numérique de notre système de santé.