La numérisation enrichit le travail quotidien des juristes, qui peuvent ainsi apporter une valeur ajoutée nouvelle à tous les acteurs de l'entreprise.

Marina Stavrinides, directrice juridique (Europe du Sud, UK/Irlande, Middle East & Africa, Benelux), PTC nous montre dans cet interview comment la numérisation enrichit son travail quotidien et son rôle dans l'entreprise. 

"De plus en plus, nous faisons partie des équipes projets voire nous sommes leaders de certains projets."

Syntec Numérique : De quelle manière le numérique impacte-t-il le métier de juriste dans votre entreprise ?

Marina Stavrinides : Nous sommes un éditeur de logiciels. Les outils numériques font partie de notre quotidien. Notre rôle est d'accompagner nos clients dans leur transformation numérique en les aidant à répondre au mieux à leurs problématiques et à leurs enjeux, qui varient beaucoup d'un secteur à l'autre. Le numérique a complètement transformé le métier de nos clients ; de fait, notre métier d'éditeur a évolué et le travail du juriste a lui aussi été impacté. Par exemple, les aspects juridiques liés aux offres cloud (SaaS) sont très différents de ceux des projets traditionnels que nous réalisions avant sur la vente des licences. Les garanties logicielles, les enjeux sur la sécurité des données, la responsabilité de chacune des parties, tout cela a changé. En plus, il a fallu intégrer le RGPD !

SN : Cela change-t-il le rôle du juriste au sein de l'entreprise ?

M. Stavrinides : Oui, cela change le rôle du juriste et surtout cela l'enrichit. D'abord, la responsabilité de l'éditeur logiciel vis-à-vis de son client est différente comparé à il y a quelques années. Il faut la redéfinir, la cerner, spécifier son champ d'application… Où commence cette responsabilité, qu'entraîne-t-elle, quelles sont les données concernées ? Etc. Ensuite, la numérisation élargit le champ du travail juridique à de nouvelles tâches, de nouvelles interactions avec les autres départements de l'entreprise. Pour cela, il faut réfléchir à comment faire évoluer le métier, à la manière dont nous proposons nos services à nos clients internes. Cela passe aussi par l’évolution des outils et de la méthodologie que nous utilisons. Les juristes n'assurent plus seulement la dimension juridique des projets mais aussi leur dimension stratégique. Ils apportent une valeur ajoutée nouvelle qui en fait des partenaires business plus que des prestataires internes. C'est gratifiant !

SN : Qu'entendez-vous par "valeur ajoutée nouvelle" ?

M. Stavrinides : De plus en plus, nous faisons partie des équipes projets voire nous sommes leaders de certains projets. Par exemple, nous participons à toutes les étapes de la vie du contrat et nous comprenons de mieux en mieux les enjeux du client. De cette façon, nous avons une opinion, une vision du contrat qui nous permet d'accompagner les équipes commerciales au-delà de la seule négociation juridique, de dépasser ce stade et d'intervenir comme conseil afin de leur apporter une valeur ajoutée et de faciliter leur travail. Nous avons développé des « playbooks », des scripts d'accompagnement des juristes pour la négociation contractuelle. Nous étudions toutes les innovations comme l'automatisation des contrats, la blockchain, l'intelligence artificielle, et bien d’autres, pour voir comment elles peuvent faciliter notre travail,  minimiser les tâches à faible valeur ajoutée afin de dégager du temps sur des projets à plus forte valeur ajoutée. Par exemple, notre département juridique participe à un projet d’entreprise, le projet Digital Office. Celui-ci consiste à gérer toute la chaîne de l’expérience client – de l’offre, jusqu’à la contractualisation, la facturation, la gestion du contrat de souscription, le renouvellement, etc.  Grâce au travail des équipes juridiques européennes, nous avons pu imposer l’automatisation des contrats comme priorité dans le cadre de ce projet.
 
En conclusion, je crois que le numérique rend notre travail quotidien plus intéressant !